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Palabres rom’âne’sques

Apollon : « Voilà des semaines que nous sommes arrêtés dans un parc. C’est vrai qu’avec toute cette longue marche, on était bien au début. Mais à présent, c’est longuet. On a besoin de se dégourdir un peu les jambes. Heureusement, on va promener le petit de temps en temps. »

Basil : « Ici, l’herbe est sèche. Mais le maître n’est pas très intelligent. Il croit qu’un bout de ficelle nous retient. Tu parles. Lors d’une ballade, on a bien vu qu’il y avait de l’herbe verte à certain endroit. Alors, quand il a le dos tourné, je file entre les fils et je vais manger l’herbe ou les haricots de l’arbre du voisin. Pas l’herbe du voisin, car c’est que des cailloux. »

Apollon : « Tu as de la chance toi. Quand tu sortais, il te remettait dedans sans mesure. Mais quand c’est moi qui suit enfin sorti, il nous a attachés. Et puis un jour, il nous a fait un magnifique parc, mais il a fallu que l’on touche le fil du museau et là, bonjour les dégâts. Pas très agréable cette clôture électrique. »

Basil : « Ouais, t’as raison, depuis, on ne peut même plus filer. »

Apollon : «  On leur a donné un peu de fil à retordre, pour pas qu’ils nous oublient. Bon, c’est vrai que chaque matin, le petit vient nous donner un bout de pain sec ou une carotte. Je l’aime bien celui-ci. Quand il vient sur mon dos avec sa nouvelle selle, il est bien plus léger que les anciens bagages. »

Basil : « Dis plutôt qu’il te mène par le bout du nez. Quand il veut te faire trotter, tu obéis comme si tu avais mon âge. Moi, il ne m’a pas comme ça ! »

Apollon : « Bah, ne te plaint pas, ils ne sont pas méchants nos maîtres. Ils sont un peu bougres, mais on est bien ici. »

Basil : « Oh oui, tant qu’ils ne nous remettent pas dans cette chariote du diable qui nous secoue pendant des heures pour se retrouver dans un endroit inconnu, tout va bien ! »

Joies et plaintes des ânes

Basile : « Pourquoi nos maîtres ont-il quitté la douceur des canaux ? A part qu’il y avait toujours de l’eau à côté de nous (on n’aime pas trop l’eau vous savez), il y avait de l’herbe verte, de l’ombre et du plat. A présent, c’est montée et descente sans arrêt, les sentiers cath’ânes qu’ils appellent. Notre gosier est sec des herbes sèches. »

Apollon : « Bon, au moins, il ne pleut pas ici. Le pire, c’est quand nous avons dû faire toute une journée de descente, 1’000 mètre de dénivelés qu’ils ont dit. Mon dos en frissonne encore à cause du frottement des bâts. Mon garrot en est tout épilé. »

Basile : « Mais le pire du pire, c’est qu’il a fallu tout remonter le lendemain quelle ânerie. Tu te souviens du passage avec des tubes, cân’adien qu’ils disent. Le maître a dû nous faire passer dans le lit de la rivière. Quelle pente ! »

Apollon : «  Et la fois de l’escalier métallique. Heureusement que j’ai résisté, sinon, bonjour la catastrophe. Je crois qu’ils ont eu quand même peur. On a fait demi-tour. »

Basile : « Mais bon, en même temps, mon burro, quel bonheur de voir du pays, ces montagnes sont belles, il y a pleins de nouvelles saveurs à goûter, des mûres, des cynorrhodons, des olives et toutes ces herbes nouvelles. »

Apollon : « Question bonheur, tu te souviens aussi de cette dame, Monica. Elle a massé mon beau corps tout musclé. Je crois qu’elle avait le béguin pour moi. »

Basile :  « Parle pour toi, les caresses, il y en a que pour toi ! »

Apollon : « De toute façon, tu as toujours été jaloux. Chaque fois que les gens me caressent, il faut que tu me pousses loin pour en avoir plus. »

Basile : « Dis, je crois bien que nos âniers sont fatigués, ça fait une semaine qu’on se repose ici. L’autre jour, dis donc, le maître est monté sur ton dos ! »

Apollon : « Ouais, je l’ai bien senti, il est bien plus lourd que le gamin, mais moins lourd que les bagages… Quoique ?! »

Basile : « Moi, j’ai dû porter les provisions pour une semaine, les sacoches n’ont jamais été aussi lourdes. Quelle ânerie, faire autant de provisions à la fois ! La donzelle doit avoir peur qu’ils aient faim ! »

Les aléas du chemin

Basil : « Peuchère, mes amis, quel chemin. Et quel détour. Avant une bourgade (St André-Cap-Cèze), mon bougre de compagn’âne nous oblige tous à faire demi-tour. Il ne veut pas passer un endroit entre deux rochers. D’accord, il est un peu étroit, mais moi, je l’ai passé facilement. Lui, Apollon, on dirait qu’il patauge dans le yaourt, ses sabots glissent  et il panique. Heureusement, la maman a vite pu descendre le gamin, car ça bougeait plus que dans un manège. Il devait pas aimer ça, car il hurlait. Mais je crois pas qu’il n’a eu du mal.

Même débâté, Apollon ne veut pas passer. C’est un bourricot de la plaine, pas de la montagne. Bon, c’est lui qui porte le petit, je vais pas m’en plaindre. Et voilà, que nos maîtres nous font faire demi-tour. Je les entends parler et comprends quelques mots comme : « passage difficile plus loin, prudence, débâter à nouveau, attention. » Bon, c’est vrai que le chemin plus bas est meilleur. Mais leur panneau qui signale ce chemin, les gens auraient pu le mettre à la bifurcation, pas après le passage difficile. Paroles d’ânes »

Apollon : «  Moi, je veux vous parler d’une journée de goudron, sacrebleu et quelle montée. A une croisée, nos maîtres parlent de raccourcis par la route. Bon, jusque là, pourquoi pas. Mais les 2-3 km de routes durent en fait plus d’1h30 de marche, sur du goudron, sous le soleil et en montée. Bon, heureusement, le gamin fait la sieste chez son père. Vous savez, nous les ânes, nous connaissons aussi la loi de Murphis. Quand tout va mal, tout va encore plus mal. Car en fait de raccourcis, c’est un détour. C’est à une croisée de route que nos maîtres décident enfin de nous laisser brouter un peu à l’ombre d’un cerisier. Quel festin pendant qu’ils essayent de savoir où nous sommes.

Nous les ânes, nous ne sommes jamais perdus, tant qu’il y a de l’herbe bien tendre. J’entends dire que le GPS est en panne, que l’humain ne trouve pas les piles rechargées et qu’en plus cette route que nous avons pris ne figure pas sur la carte du guide. Cette nouvelle route qu’ils disent, un gars du village dit qu’elle a 20 ou 30 ans! Il pourrait au moins mettre des cartes récentes dans les guides pour éviter aux âniers de faire des âneries en prenant des raccourcies. Car en plus, ils nous font faire à nouveau 2 km pour rejoindre le « vrai » chemin. Quelle journée mes ânis. »

Basil : « Nos bourreaux sont redevenus des âniers digne de ce nom. Ils nous ont enfin remis un parc où l’on peut se promener un peu. Bon, vous me direz que l’on se promène toute la journée et vous avez raison. Mais un peu plus d’espace pour se rouler et se reposer nous fait du bien. Ils ont laissé les chaînes aux Romains. Par contre, ils nous ont mis de l’électricité, quelle affaire cette histoire, pas drôle pour nos museaux si sensibles. »

Apollon : « Nous avons fait une bonne farce à notre maître. Il était venu pour nous déplacer le parc et nous donner plus d’herbes. Mais cette ouverture du parc, c’était tellement tentant. Alors quand mon comparse a pris ses pattes à son cou, je me suis empressé de le suivre. Notre Olivier essaye de nous rattraper, mais il devra faire 3 fois le tour du camping pour nous choper. Et même que pour sa fierté, c’est la petiote qui nous a attraper. Bon, on s’est bien défoulé et tous les gens sortaient de leur cabane en dure ou en toile pour nous voir passer. Quelle popularité ! »

Compagnon’ânes

Parole aux ânes :

Après quelques jours d’une bonne herbe tendre à St Hilaire avec 3 autres comparses à grandes oreilles, nos âniers reprennent le chemin. Ils font moins de bêtises. A part nous faire descendre une montagne  pour monter peu après sur la côte d’en face.

Un soir, notre guide nous plante dans un pré et part. On ne le voit plus. Tout d’un coup, deux coups de feu retentissent juste à côté. Olivier accourt pour dire qu’ils dorment un peu plus loin. Le gars affirme qu’il a le droit de tirer des ragondins qui lui mangent ses cultures. Ils ont eu bien peur.

Un peu plus loin, il nous font traverser une grande ville. Jamais vu autant de voitures et d’immeubles. Quelle folie mes ânis. Pas un coin d’herbes à brouter. Mais là au moins, les gens nous comprennent, nous les ânes. Ils nous plaignent du poids que l’on porte, pas comme dans les campagnes où les gens trouvent cela normal.

Bon, nos maîtres, on les aime bien. Surtout le petit qui nous fait de gros câlins. Il nous confie des secrets en nous caressant les oreilles. Même une fois, le gamin nous a filmé en nous demandant de raconter quelque chose.

Nos maîtres nous font plus confiance et nous leur rendons bien. Ils nous laissent brouter un peu sans être attaché. Ma foi, nous ne voulons pas partir, pour aller où ? Nous sommes perdus sans eux. Même qu’ils sont d’accord de lâcher un de nous à tour de rôle pour donner la main au petit qui marche. Bon, ils ne nous lâchent pas encore les deux, mais ça viendra peut-être…

Un jour, Olivier nous laisse enchaînés à côté de succulentes salades. C’est un supplice trop tentant. Lui qui se croit plus malin que nous a mal fixé le piquet. Nous profitons qu’il s’éloigne pour aller croquer la tendre laitue. Il se fait bien réprimandé par le propriétaire du camping.

Basil : « Une autre fois, mon bon maître a voulu me faire passer dans une rivière. J’ai vite compris l’arnaque, car nous n’étions même pas bâtés. Il voulait nous tester, alors j’ai  mis les pieds dans l’eau sans faire d’histoire, pour que ça aille plus vite. Apollon nous a suivi. Mais moi, je l’ai bien eu, car j’ai fait mes besoins dedans. Il était tout embêté, surtout la pitchoune qui faisait la mou et s’excusait auprès des gens qui nous regardaient. Ca leur apprendra à nous mettre dans l’eau pour le plaisir. »

Apollon : « Le maréchal ferrant est venu enfin voir mon sabot, qui est devenu un peu sensible. Un trou s’est formé là où j’ai eu mon abcès avant de partir en voyage. Heureusement, sur les conseils de Sébastien (merci maréchal), mon maître me met du goudron de Norvège pour consolider la paroi. Le lendemain, je m’écorche le sabot sur une caillasse et, grâce au goudron, mon sabot ne me fait pas trop mal. »

Basil : « A présent que nous sommes en plaine, nous sommes tous les deux dans un parc de rêves, immenses je vous dis, avec pleins d’ombre. Nous pouvons prendre quelques jours de repos bien mérités. Même que c’est notre maître qui doit marcher pour nous trouver. »

La montagne racontée par les ânes

Basil : « Ce matin, nos maîtres ont décidé de monter au col des Nantes. Quelle montée mes ânons, même un bourriquot peu chargé comme cette fois a de la peine à monter. Et c’est pas le tout, mais une fois en haut, on a à peine le temps de brouter quelques touffes d’herbes sous le vent bienvenu que nos humains veulent redescendre.

Bon, ça va, le petit marche un peu, j’ai moins de poids et on va moins vite. Après la pause, mes aïeux, ils nous prennent pour des chamois. Le problème, c’est nos fameuses sacoches qui nous rendent larges comme un éléphant. Le fossé est bien raide. Notre bon maître nous aide et s’en va sur le chemin avec nos sacoches, puis il vient nous chercher l’un après l’autre. Notre guide a peur pour nous, c’est normal, il y a un espèce de câble pour les humains. Mais nous n’avons pas peur de quelques pierriers et d’un fossé, Nous n’avons pas le vertige, nous les ânes ! Vous auriez dû voir l’expression de notre maîtresse quand elle a vu où on était passé : de la stupeur et de l’étonnement. Et oui, on passe partout, il ne faut pas nous sous estimer. Mais je crois que mon maître a eu un peu peur lui aussi, mais il ne le montre pas. »

Apollon : « Et voici que le lendemain, nos chers humains remettent ça. Cette fois, c’est une grande forêt. Mon ânière préférée m’attache à une racine, son mâle enlève les sacs à Basil et ils partent tous en me laissant tout seul. Je ne suis pas d’accord et tire sur ma longe. Une fois, j’ai vu Basil tiré tellement qu’il a réussi à casser sa longe. Elle finit par lâcher, la racine, pas la longe et je vais les rejoindre. Ces humains ne sont pas si bêtes de m’avoir attaché : il y a un arbre qui me barre le chemin et me pousse dans le ravin. Je glisse en essayant d’éviter les arbres, tant et si bien que je perds mes sacoches dans la glissade. Mon bât se déséquilibre et se retrouve sont mes entrailles. Je ne vois plus le chemin, ni mes comparses. Je suis coincé contre un arbre et j’attends longtemps avant que mon maître daigne venir me chercher. Je les entends qui m’appelle et je leur réponds plusieurs fois. M’entendent-ils ? »

Basil : «  Les humains ont l’air horrifiés. Ils ne savent pas où est mon copain. Et je ne le vois plus. Que font-ils ? Nous partons sans lui ! Je résiste un peu, et puis je cède. En plus, je les entends téléphoner à l’aide, je crois qu’ils parlent des grands-parents du p’tiou. On marche un bon moment, puis le chemin revient en lacet sur le contrebas où on a perdu Apollon. Et là, je l’entends qui m’appelle et je lui répond, il est vivant ! Olivier part à sa recherche. Je suis un peu nerveux, Sonia me calme, mais je sens qu’elle est nerveuse aussi et inquiète. Le petit gars parle des sacoches qui ont dû tomber et glisser jusque dans le Lac d’Annecy. Il a beaucoup d’imagination ce petit bonhomme. Après un bon moment d’attente (c’est toujours long d’attendre, surtout quand on est attaché serré avec presque rien pour brouter), j’entends Apollon braire au loin, et les voilà qui arrive, entier. C’est la fête. Peu après, arrivent les aïeux. La grand-mère prend le gamin par la main et ils descendent le chemin. Le grand-père, mon bon maître et la fillotte nous prennent et on remontent tous le chemin. Ils nous laissent au bord du sentier et continuent seuls. »

Olivier, pas l’âne, le mari : «  Voilà, c’est là qu’est tombé Apollon, quelle folie, c’est hyper raide. Les sacoches doivent être juste un peu plus bas. On va descendre par le pierrier juste à côté pour aller les chercher. Martial, ça va aller ? Mais non, Sonia ne t’inquiète pas, reste en haut pour nous guider, c’est une promenade de santé. Tu vois la première sacoche Martial ? Ok, on va les remonter à la main. Ho hisse ! Super. Maintenant, on va les porter ensemble jusqu’aux ânes. OK, on va rejoindre Giselle et Eliot qui doivent être au camping car »