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Les réflexions d’Eliot

Suite au chemin romain de la Régordane, Eliot fait souvent référence à cette population.

En quittant le bord de mer, Eliot demande :

– Maman, les romains, y passaient sur ces chemins ?

– Peut-être, répond maman, tu crois qu’ils allaient se baigner dans la mer ?

– Oui, sûrement, dit Eliot, et ils allaient aussi au camping.

– C’est aussi les Romains qui ont fait la place de jeu ?

En quittant les canaux et Port-la-Nouvelle, nous reprenons des grimpées et des descentes dans la garrigue. Maman relève :

– C’est moins plat que le canal ! En fait, il y a peu de choses aussi plat qu’un canal !

– Il y a le bord de mer ! répond papa.

– Et encore, réplique maman, la mer est plate, le bord pas toujours.

– La mer est pas plate, il y a les vagues, affirme Eliot.

Dans une épicerie de village, Eliot croise une dame et lui dit :

– Bonjour Madame.

– Bonjour, répond-elle.

– Je dis toujours bonjour aux gens, réplique Eliot.

– Et bien ! C’est très poli, dit la dame.

– Mais les gens y répondent pas toujours, répond Eliot.

– Ca, c’est moins poli, conclut la dame.

Maman montre un arbre à Eliot en expliquant que c’est un cyprès, un arbre souvent tout droit et long. Après réflexion, Eliot dit : « les cyprès, c’est parce qu’il sont tout près, sinon, c’est des cyloin ! »

En parlant avec Eliot de l’histoire des châteaux forts, Eliot demande : « Tu crois qu’ils habitaient encore dans les châteaux quand ils étaient en ruine ? »

Un soir qu’Eliot allait au lit plus tard, nous lui montrons les étoiles, en essayant de lui faire voir la grande ourse. Le lendemain, il y a beaucoup d’humidité sur la tente et dans le pré. Après réflexion, Eliot affirme : « la rosée, c’est seulement quand il y a la grande ourse ! »

Sur un magnifique sentier, nous discutons que ce doit être un chemin de muletiers, qu’à l’époque, ils ont eu beaucoup de travail pour le réaliser, car il y a de petits murets sur le côté et dessous pour pouvoir passer. Eliot, qui écoute tout et veut participer à la conversation, dit : «  oui oui, les romains (encore eux !), y z’ont fait ce chemin, à l’époque, et ils passaient par là. » Puis il s’arrête et demande : « papa, c’est où à l’époque ? »

En terre catal’âne

Nous poursuivons le canal du midi, avant de prendre celui de la Robine à Sallèles-d’Aude. Ces canaux sont bien tranquilles, extrêmement plats, la major partie du temps ombragés de platanes ou de pins. Après Narbonne, les arbres se raréfient. A l’approche de Port-la-Nouvelle, nous entrons dans une réserve naturelle. Le canal est bordé d’étangs et le paysage ressemble étrangement à la Camargue. Le temps est beau et chaud à part une journée pluvieuse.

Nous prenons quelques jours de repos à Port-la-Nouvelle, dans un camping à 5 min de la mer, avec piscines chauffées, toboggans et magnifique place de jeu comme nous n’en avons jamais vu. Eliot se régale entre l’eau et les jeux.

Décision est prise, nous quittons le bord de mer pour entrer dans les terres et suivre le sentier cathare à l’asseau des châteaux forts. Fini l’herbe tendre des canaux, ici c’est la garrigue avec ses buissons épineux et secs. Les ânes sont moins bien servis, quoiqu’un peu de sec leur va aussi. Fini le plat, nous retrouvons les montées et les descentes sous la chaleur moite des jours avant l’orage. Mais la sueur vaut la peine, car la vue est belle du haut des montagnes et longtemps encore nous pouvons apercevoir la mer.

Ce tronçon du voyage est marqué par de nombreuses rencontres. A Roquefort-sur-Corbière, nous partageons un bon moment avec nos voisins Marc et Joss, pendant qu’Eliot joue au trampoline avec Thomas et Maïlys.

Le sentier est très bien signalé par des bandes de couleur bleu et jaune. Il est parfois rendu difficile par la pente et les rigoles causées par le ruissellement de l’eau.

Le chemin cathare nous emmène de châteaux en châteaux, en allant crescendo. D’abord le château de Durban à usage agricole, que nous visitons après une nuit pluvieuse.

Puis, avant Tuchan, nous montons au château d’Aguilar, utilisé par les Cathares. En effet, il n’y a pas, à proprement parlé, de château cathare, car les châteaux existaient déjà avant leur arrivée. Au loin, l’orage gronde, mais nous resterons au sec.

Plus haut et plus beau, le château de Quéribus nous offre une vue époustouflante sur les Pyrénées et la Méditerranée. Le vent est tellement violent qu’à la porte d’entrée du château, il faut bien se tenir pour ne pas perdre l’équilibre.

Le village de Cucugnan, connu par son curé, nous raconte un peu l’histoire des cathares. Ces chrétiens, considérés comme hérétiques par l’Eglise Catholique, furent poursuivis et, pour beaucoup, brûlés vifs en raison de leur foi différente. Histoire sombre qui imprègne cette région de l’Aude.

Encore plus haut, plus majestueux et particulièrement bien conservé, le château de Peyrepertuse se confond avec les rochers. Difficile d’imaginer se promener à l’intérieur des murs et, pourtant, un sentier dans la montagne nous y emmène. C’est un vestige du XIe siècle qui nous ouvre ses portes et les ruines nous murmurent des histoires de chevaliers.

A Duilhac-sous-Peyrepertuse, nous quittons le sentier cathare direction le sud et les Pyrénées. Plus nous avançons à l’intérieur des terres et dans les montagnes, plus le paysage change.

La garrigue, les oliviers et les nombreuses vignes laissent doucement la place à des arbres plus grands, comme le frêne, l’acacia, le châtaigner, le hêtre, le chêne, le bouleau, le noisetier… Eliot se plaît à reconnaître ces arbres et développent un bon sens de l’observation. Il y l’œil très aiguisé pour trouver les couleurs du balisage des GR (bandes de peinture sur les arbres ou les rochers).

A la sortie du village de Duilhac, nous faisons connaissance avec Bastou et Laetitia, accompagnés de 2 chevaux, d’une pouliche de 3 mois et de 2 chiens. Ils se baladent sur ces sentiers et nous voyagerons durant quelques jours ensemble.

Le soir même, à St-Paul-de-Fenouillet, nous dormons chez leurs amis. Nous recevons une belle leçon de vie en compagnie de Line, Jesko et leur petit garçon Décembre. Ils ont beaucoup voyagé à pied et vivent à présent sous un tipi, très simplement, en cultivant leur terre. L’après-midi sera utilisée pour faire du jus de raisin comme à l’époque, avec les pieds et les mains, et il est excellent. Le soir, c’est pizzas au feu de bois cuites dans un four creusé à même la roche : mmm un délice. Nous passons un super moment. En les quittant, nous avons l’impression d’être riches avec tout notre matériel.

A Trilla, une pluie diluvienne s’abat sur nous juste après le pique-nique. Après 5 min, trempés, nous rebroussons chemin pour nous abriter au village et retrouvons Bastou et Laetitia. Ils se sont installés chez Monica, une anglaise, qui vit dans une ancienne cave à vin. La soirée est bien agréable, dans une ambiance anglophone, car 2 écossaises vivent chez elle quelques temps pour vendanger.

A Vinça, nous rencontrons Eldée, qui a fait le chemin de Compostelle au printemps et vit au camping avant de se trouver un logement. Plus nous allons vers le sud, plus les montagnes sont hautes. A Ballestavy, Janne et Job nous mettent un bout de terrain à disposition. Nous disons au-revoir à Bastou et Laetitia et continuons seul vers Batère, à 1’400 mètres.

Actuellement, à Arles-sur-Tech, nous prenons les renseignements pour passer la frontière espagnole et descendre tranquillement en direction de Tarragone. Nous allons bientôt dire au-revoir à la France.