Compagnon’ânes

Parole aux ânes :

Après quelques jours d’une bonne herbe tendre à St Hilaire avec 3 autres comparses à grandes oreilles, nos âniers reprennent le chemin. Ils font moins de bêtises. A part nous faire descendre une montagne  pour monter peu après sur la côte d’en face.

Un soir, notre guide nous plante dans un pré et part. On ne le voit plus. Tout d’un coup, deux coups de feu retentissent juste à côté. Olivier accourt pour dire qu’ils dorment un peu plus loin. Le gars affirme qu’il a le droit de tirer des ragondins qui lui mangent ses cultures. Ils ont eu bien peur.

Un peu plus loin, il nous font traverser une grande ville. Jamais vu autant de voitures et d’immeubles. Quelle folie mes ânis. Pas un coin d’herbes à brouter. Mais là au moins, les gens nous comprennent, nous les ânes. Ils nous plaignent du poids que l’on porte, pas comme dans les campagnes où les gens trouvent cela normal.

Bon, nos maîtres, on les aime bien. Surtout le petit qui nous fait de gros câlins. Il nous confie des secrets en nous caressant les oreilles. Même une fois, le gamin nous a filmé en nous demandant de raconter quelque chose.

Nos maîtres nous font plus confiance et nous leur rendons bien. Ils nous laissent brouter un peu sans être attaché. Ma foi, nous ne voulons pas partir, pour aller où ? Nous sommes perdus sans eux. Même qu’ils sont d’accord de lâcher un de nous à tour de rôle pour donner la main au petit qui marche. Bon, ils ne nous lâchent pas encore les deux, mais ça viendra peut-être…

Un jour, Olivier nous laisse enchaînés à côté de succulentes salades. C’est un supplice trop tentant. Lui qui se croit plus malin que nous a mal fixé le piquet. Nous profitons qu’il s’éloigne pour aller croquer la tendre laitue. Il se fait bien réprimandé par le propriétaire du camping.

Basil : « Une autre fois, mon bon maître a voulu me faire passer dans une rivière. J’ai vite compris l’arnaque, car nous n’étions même pas bâtés. Il voulait nous tester, alors j’ai  mis les pieds dans l’eau sans faire d’histoire, pour que ça aille plus vite. Apollon nous a suivi. Mais moi, je l’ai bien eu, car j’ai fait mes besoins dedans. Il était tout embêté, surtout la pitchoune qui faisait la mou et s’excusait auprès des gens qui nous regardaient. Ca leur apprendra à nous mettre dans l’eau pour le plaisir. »

Apollon : « Le maréchal ferrant est venu enfin voir mon sabot, qui est devenu un peu sensible. Un trou s’est formé là où j’ai eu mon abcès avant de partir en voyage. Heureusement, sur les conseils de Sébastien (merci maréchal), mon maître me met du goudron de Norvège pour consolider la paroi. Le lendemain, je m’écorche le sabot sur une caillasse et, grâce au goudron, mon sabot ne me fait pas trop mal. »

Basil : « A présent que nous sommes en plaine, nous sommes tous les deux dans un parc de rêves, immenses je vous dis, avec pleins d’ombre. Nous pouvons prendre quelques jours de repos bien mérités. Même que c’est notre maître qui doit marcher pour nous trouver. »

La Chartreuse verte s’est blanchi

Après avoir bien profité de notre séjour au Montcel, nous reprenons notre marche le vendredi 20 mai 2011 sous un grand soleil, accompagnés par Sabine, Nicolas et Florian. Ils marchent avec nous durant 3 jours. Leurs sacs sont bien chargés et même trop : avec tente, karimat, sac de couchage, pique-nique pour 3 jours, 3 parapluies… Il semble que s’ils repartent marcher, ils se chargeront un peu moins…

Les chemins que nous suivons alternent entre routes et sentiers. Ils nous permettent d’avancer au côté de fleurs des champs d’une multitude de couleurs. Sonia a un coup de cœur particulier pour les coquelicots.

Nous évitons la traversée de Chambéry en la contournant et en passant par Challes-les-eaux et sa place de baignade.

Depuis là, nous apercevons le Mont Granier, énorme falaise rocheuse.

La montée au col de Granier se fait en douceur, de 300 m à 1134 m, en 2 jours. De là haut, nous regardons toute la vallée que nous avons traversée. C’est impressionnant de voir ce que nous avançons en une journée, même en faisant 10 km par jour. Pas à pas, nous progressons.

Pour quitter la route du col, nous prenons un sentier pédestre et une vue grandiose s’offre à nous : le massif de la Chartreuse, paysage majestueux de montagneux, des champs tout en fleur et d’à peine quelques nuages pour contraster.

En traversant la vallée des Entremonts, nous faisons halte à St Pierre-d’Entremont. Village particulier, car il est à double, un côté Savoie et l’autre, du même nom, côté Isère : 2 mairies, 2 églises, mais une poste.

Jeudi soir 26 mai, nous vivons un terrible orage : le tonnerre résonne dans les rochers tout autour de nous, c’est impressionnant. Eliot dort de son premier sommeil et ne bronche pas. Le lendemain commence par la pluie, alors nous décidons de faire une journée de repos. Que voulez-vous, nous marchons depuis presque 2 mois sous le soleil, on ne va pas marcher un jour sous la pluie, alors que la météo annonce du beau pour le lendemain.

Samedi 28 mai 2011, nous passons le Col du Cucheron pour entrer dans la vallée de la Chartreuse, réputé pour son monastère perché à 1’000 mètres d’altitude et pour sa liqueur. Olivier se gêne beaucoup moins quand il en boit depuis qu’il a appris que les Pères Chartreux participent beaucoup au développement de la région avec les bénéfices des ventes. Du coup, il trinque … aux écoles !!

Le Col du Coq nous réserve une belle surprise : au matin, nous découvrons 15 cm de neige fraîche, tout à fait idéale pour faire un bonhomme de neige. La température a bien baissée et nos ânes se cachent dans l’abris-bus.

Pour le long week-end de l’Ascension, nous séjournons à St Hilaire du Touvet avec Carina et famille. Stéphane vient faire du parapente avec le club de la Gruyère. Le site est réputé au niveau de la France, et même de l’Europe, mais la météo n’est pas favorable à de grands vols. Nous trouvons des compatriotes pour nos ânes et ils séjourneront dans un enclos de l’association Caravânes. Merci à eux pour leur accueil.

Pour la suite, nous descendrons dans la vallée de l’Isère pour rejoindre le Vercors.

Les mots d’Eliot

Je pars en voyage. On dort des fois sous tente et des fois, on dort chez des gens.

Au début, je vais sur Basil, mais maintenant, j’ai envie de marcher, tout seul, avec mon super bâton. L’autre jour, j’ai cueilli des fleurs pour maman. Elle les mets sur nos bâtons et ça faisait des bâtons bouquet de fleurs. C’était joli. Quand on a monté au camping en haut de la forêt, j’ai grimpé sur les racines des arbres. Même que les ânes ont un peu glissé, je suis monté tout seul. J’essaie de trouver les traces de Basil ou Apollon sur la terre.

Une fois, on a traversé un champ où il y avait des vaches avec des veaux et le taureau. Maman a dit qu’il fallait aller vite. Papa a dit que s’ils venaient vers nous, maman et moi on devait passer sous le fil et aller dans l’autre champ. Moi, j’ai eu un peu peur et j’ai marché très vite.

Je vois pleins de places de jeux. Un fois, j’ai eu 3 en une journée. C’était beaucoup, presque comme à Villeneuve. A St Hilaire, il y a beaucoup d’enfants, et moi j’aime quand il y a beaucoup de monde à la place de jeu.

Papa et maman raconte notre voyage aux gens. Alors moi je veux aussi expliquer et je dis qu’on va au Vercors, qu’on a une année devant nous.

J’aide beaucoup papa et maman. Je monte les barres et donne les sardines à papa pour monter la tente. J’aide maman à faire la lessive.

Quand on a vu grand-maman et grand-papa, j’ai été avec eux dans le camping car pour aller aux places de jeux. Et même qu’on a vu la neige. J’ai fait un bonhomme de neige avec grand-maman. Je me suis roulé dans la neige.

Ici, on a descendu en funiculaire. C’était trop chouette. J’ai vu plein de delta plane et de parapente. C’était impressionnant.

Le massif des Bauges

Le parc naturel des Bauges

Après les péripéties en montagne de nos ânes, une journée de repos (6 mai 2011) au camping de La Thuile avec piscine et belle place de jeu permet de faire le point. Pour la suite de notre escapade dans les Bauges, Olivier revoit le parcours. Nous allons éviter les cols à gros dénivelés et les sentiers de montagne pour le moment. Nous choisissons de longer les vallées, quitte à faire un détour pour être plus tranquille.

Les jours suivants se déroulent assez tranquillement et chaudement. La météo est estivale. A St Jorioz, nous prenons la vallée au sud du Semnoz et montons doucement vers les Bauges. Le dimanche de la fête des mères, Sonia a droit (et les autres aussi) à un repas au restaurant pour le midi. Ça tombe bien, le sac de pique-nique est un peu vide. Le soir, nous dormons dans un camping fermé, comme dit Eliot. Les Framboisiers, c’est son nom, n’ouvre que mi-juin, mais la patronne a accepté de nous laisser un bout de terrain. Une vue grandiose depuis la tente nous invite à la rêverie.

Encore 2 jours de marche avant d’arriver au Montcel, 2 jours de soleil, dans une nature magnifique, à travers des villages joliment rénovés dans le style de la montagne et souvent en bois. Les champs sont hauts et fleuris d’une riche variété de couleur. C’est un régal. Juste à nouveau un passage délicat avec les ânes, auxquels il faut enlever les sacoches. Le passage étroit passé, c’est Basil qui nous fait une ânerie : il n’est pas tenu (et n’a bien sûr pas Eliot sur son dos) et décide de revenir un bout en arrière. Il panique un peu en nous voyant de l’autre côté d’un sentier. Il décide de prendre le raccourci, qui passe par le ravin d’une vingtaine de mètres pour s’enliser dans le bout de rivière en contre bas. Olivier attache Apollon et file l’aider. Mais en enlevant les sacoches et le bât à Basil, ce dernier arrive à sortir du lit de la rivière.

A Allèves, nous cherchons dès les premières maisons un endroit pour notre tente et nos ânes. Nous apercevons une magnifique place de jeu, avec robinet et table de pique-nique. Après renseignement au village, nous nous installons et plantons la tente ici, sur la place de jeu. Eliot est aux anges, même s’il jouera plus longement avec les gallets qu’avec les jeux.

Arrivés le 10 mai chez nos amis Chantal et Philippe, nous y resterons plusieurs jours. Le temps de se prendre des vacances, de retrouver nos amis, de faire quelques achats, de soigner le petit orteil de Sonia qui a été cloqué de toute part et compeedé en entier, de faire une visite chez le rebouteux pour le dos d’Olivier. Le temps aussi de faire un brin de bucheronnage pour Olivier, d’écrire sur le blog pour Sonia, de jouer à toutes sortes de nouveaux jouets pour Eliot, de profiter un peu de se poser quelques parts. Pour les ânes, c’est l’occasion d’une visite du maréchal ferrant pour rééquilibrer les sabots, surtout chez Basil.

Nous repartons le vendredi 20 mai, vers Chambery, puis le massif de la Grande-Chartreuse… en étudiant bien notre itinéraire.

Pleins de péripéties

Avant et après Genève, des jeunes filles nous accompagnent : Jane avant Pâques, Laurianne durant le week-end, puis Caroline durant 2 jours. Elles apportent un nouveau souffle dans la compagnie et les jeux avec Eliot. Il en parle encore aujourd’hui.

Le mardi après Pâques (26 avril), nous improvisons et provoquons un souper grillade avec cousin et oncle : Claude et famille viennent chercher Caroline, Rémy et Laurence viennent nous apporter un coli postal de matériel pour les ânes. Tout cela se passe sur une place de pique-nique, en face du dolmen de la Pierre aux Fées. C’est un moment très sympathique.

A La Roche-sur-Foron, nous sommes accueillis dans un couvent de sœurs où Eliot est l’attraction. Le lieu est paisible. Nous émergeons le matin à 8h45, avec un sommeil de plomb. Si nous savions ce qui nous attend durant la journée suivante, nous serions bien restés un jour de plus.

Journée de pluie et malchance

Nous essuyons notre premier orage et longue pluie toute l’après-midi, dans un chemin boueux, escarpé, avec passage dans le lit d’une rivière, le col des Gardes à monter et à redescendre. Nous hésitons à y aller, car nous avons 2h de marche avant le prochain village. Le temps estvmenaçant, mais il l’est depuis plusieurs jours, alors, go, on part.

Finalement, nous arrivons à un village vers 16h, dernier moment pour chercher où dormir, selon notre organisation. On repère la seule ferme dans ce village désert. Le chien nous aboie tellement  que la fermière vient voir ce qui se passe. Nous lui demandons si nous pouvons dormir un nuit dans leur grange ou monter la tente et avoir un peu de pâture pour les ânes. Elle nous dit que son mari n’est pas là et qu’elle ne peut pas nous dire oui. Le problème, c’est qu’il ne rentre pas avant 17h30 et qu’elle ne connait pas d’autres fermes dans les environs. Il y a bien le camping, mais il est à 4-5 km. Il pleut, Eliot en a marre (je crois que c’est la première fois comme cela), et nous aussi, mais rien n’y fait.

On remballe tout et on repart. On demande 1-2 autres fois si les gens connaissent un endroit pour planter notre tente et mettre nos ânes, mais personne ne sait. Après avoir appris que le camping est en fait fermé, on se résigne même à appeler une chambre d’hôtes, mais les propriétaires sont en vacances. C’est vraiment le jour malchance.

En fin de compte, au Petit-Bornand, vers 18h, Philippe, un gars bien sympathique (comme tous les Philippe), nous propose de nous mettre sous l’avant-toit de sa maison. Ouf. On est à l’abris pour dormir. Eliot, ayant repris du poil de la bête, joue gaiment, alors que les parents sont KO de cette journée qui n’en finit pas.

Le début des montagnes

Le 29 avril, c’est 800 mètres de montée qui nous attend pour atteindre le Plateau des Glières, haut lieu de la résistance : les alliés y ont parachuté des armements pour la libération de la France durant la 2ème guerre mondiale. A nouveau, un peu de pluie dans l’après-midi, mais beaucoup moins que la veille. On passe 2 jours dans un refuge de montagne. Olivier est tout malade, il a attrapé l’angine à streptocoques à Sonia. Il emprunte la voiture du patron du refuge pour descendre trouver une pharmacie. Les chèvres, lapins, oie et poule dans un grand enclos occupent longuement Eliot.

Le lendemain, nous marchons un bon moment sur ce plateau qui est très agréable et offre une belle vue. Puis la descendre assez abrupte se fait d’abord par un bon chemin en pierre. Mais les 2 derniers km sont les plus rudes, le chemin se rétrécit, avec des passages de rivières, un pont de rondins. Nous voyons enfin le camping car des parents de Sonia qui viennent nous trouver pour quelques jours. Moment de retrouvailles. Nous pouvons nous reposer et profiter un peu des grands-parents pour l’apéro et le souper. Eux sont plein d’énergie pour jouer avec Eliot.

Visite chez le médecin

Le lendemain est jour de repos, car Sonia a une angine, à nouveau. Nous partons à la recherche d’un médecin à Thônes, avec le camping car. Toute la famille y va, car nous craignons une contagion continuelle de l’un à l’autre, Olivier étant encore sous antibiotiques. En fait d’angine, il s’agit d’une rhino-pharyngite familiale.

Entretien avec la police

Ensuite, c’est l’événement police. Nous arrivons au fond d’une vallée et trouvons un bout de pré pour nos ânes, mais comme il n’y a pas grand monde autour, nous ne demandons à personne. Grave erreur, car 2h après notre arrivée, une voiture de police s’arrête juste après le camping car. Sonia sort pour demander des conseils sur la route du lendemain et les entend parler d’âne. En fait, ils parlent des nôtres. Sonia explique la situation et c’est OK pour une nuit. Il prend quand même notre identité. Nous saurons pour la suite qu’il faut demander à la mairie selon le lieu où l’on veut camper.

La montagne racontée par les ânes

Basil : « Ce matin, nos maîtres ont décidé de monter au col des Nantes. Quelle montée mes ânons, même un bourriquot peu chargé comme cette fois a de la peine à monter. Et c’est pas le tout, mais une fois en haut, on a à peine le temps de brouter quelques touffes d’herbes sous le vent bienvenu que nos humains veulent redescendre.

Bon, ça va, le petit marche un peu, j’ai moins de poids et on va moins vite. Après la pause, mes aïeux, ils nous prennent pour des chamois. Le problème, c’est nos fameuses sacoches qui nous rendent larges comme un éléphant. Le fossé est bien raide. Notre bon maître nous aide et s’en va sur le chemin avec nos sacoches, puis il vient nous chercher l’un après l’autre. Notre guide a peur pour nous, c’est normal, il y a un espèce de câble pour les humains. Mais nous n’avons pas peur de quelques pierriers et d’un fossé, Nous n’avons pas le vertige, nous les ânes ! Vous auriez dû voir l’expression de notre maîtresse quand elle a vu où on était passé : de la stupeur et de l’étonnement. Et oui, on passe partout, il ne faut pas nous sous estimer. Mais je crois que mon maître a eu un peu peur lui aussi, mais il ne le montre pas. »

Apollon : « Et voici que le lendemain, nos chers humains remettent ça. Cette fois, c’est une grande forêt. Mon ânière préférée m’attache à une racine, son mâle enlève les sacs à Basil et ils partent tous en me laissant tout seul. Je ne suis pas d’accord et tire sur ma longe. Une fois, j’ai vu Basil tiré tellement qu’il a réussi à casser sa longe. Elle finit par lâcher, la racine, pas la longe et je vais les rejoindre. Ces humains ne sont pas si bêtes de m’avoir attaché : il y a un arbre qui me barre le chemin et me pousse dans le ravin. Je glisse en essayant d’éviter les arbres, tant et si bien que je perds mes sacoches dans la glissade. Mon bât se déséquilibre et se retrouve sont mes entrailles. Je ne vois plus le chemin, ni mes comparses. Je suis coincé contre un arbre et j’attends longtemps avant que mon maître daigne venir me chercher. Je les entends qui m’appelle et je leur réponds plusieurs fois. M’entendent-ils ? »

Basil : «  Les humains ont l’air horrifiés. Ils ne savent pas où est mon copain. Et je ne le vois plus. Que font-ils ? Nous partons sans lui ! Je résiste un peu, et puis je cède. En plus, je les entends téléphoner à l’aide, je crois qu’ils parlent des grands-parents du p’tiou. On marche un bon moment, puis le chemin revient en lacet sur le contrebas où on a perdu Apollon. Et là, je l’entends qui m’appelle et je lui répond, il est vivant ! Olivier part à sa recherche. Je suis un peu nerveux, Sonia me calme, mais je sens qu’elle est nerveuse aussi et inquiète. Le petit gars parle des sacoches qui ont dû tomber et glisser jusque dans le Lac d’Annecy. Il a beaucoup d’imagination ce petit bonhomme. Après un bon moment d’attente (c’est toujours long d’attendre, surtout quand on est attaché serré avec presque rien pour brouter), j’entends Apollon braire au loin, et les voilà qui arrive, entier. C’est la fête. Peu après, arrivent les aïeux. La grand-mère prend le gamin par la main et ils descendent le chemin. Le grand-père, mon bon maître et la fillotte nous prennent et on remontent tous le chemin. Ils nous laissent au bord du sentier et continuent seuls. »

Olivier, pas l’âne, le mari : «  Voilà, c’est là qu’est tombé Apollon, quelle folie, c’est hyper raide. Les sacoches doivent être juste un peu plus bas. On va descendre par le pierrier juste à côté pour aller les chercher. Martial, ça va aller ? Mais non, Sonia ne t’inquiète pas, reste en haut pour nous guider, c’est une promenade de santé. Tu vois la première sacoche Martial ? Ok, on va les remonter à la main. Ho hisse ! Super. Maintenant, on va les porter ensemble jusqu’aux ânes. OK, on va rejoindre Giselle et Eliot qui doivent être au camping car »

Une journée type de notre voyage

Le réveil se fait vers 7h30 à 8h, selon Eliot. Nous prenons le temps de nous réveiller, parfois de lire une histoire, de faire un peu les fous.

Puis la phase de rangement commence : ranger les sacs de couchage, plier les matelas de sol, réunir les affaires et les répartir dans les 4 sacoches, mettre la tente à sécher et la plier, brosser les ânes, curer leurs pieds, ranger le parc (piquets et chaînes), et bâter les ânes.

Entre deux, on prend le temps de faire un bon déjeuner : en principe céréale avec lait, fruit, fromage, pain selon ce que l’on a.

Le tout nous prend bien 2h30. Ce qui fait que nous marchons rarement avant 10h30, voir 11h les jours où nous sommes moins rapides.

La marche est un bon moment. Elle nous permet d’être à l’écoute des bruits, chants d’oiseau ou silence aux alentours et de voir les beaux paysages, les arbres, la nature qui éclot en ce début de printemps. Eliot marche quelques fois, mais souvent, il va sur le siège de Basil.

Vers 12h30-13h, c’est la pause de midi. Nous débâtons les ânes et sortons le pique-nique du sac : pain, saucisson, fromage, carottes ou tomates, fruits…

Départ une heure après, les ânes sont bâtés et rebelote pour 1h à 2h de marche. Souvent, Eliot va faire la sieste dans le dos de son papa. Nous marchons environs 10 km par jours, plus ou moins selon le dénivelé, la météo et l’endroit pour dormir.

Dès 15h et maximum vers 16h, nous cherchons un endroit pour planter la tente et faire pâturer les ânes. Une fois trouvé, ce qui peut prendre plus ou moins de temps, nous débâtons les ânes et commençons par prendre le goûter. Ensuite, il faut monter le campement : planter les 2 piquets pour les ânes, leur donner à boire, monter la tente, gonfler les matelas de sol, préparer le lit.

Ensuite on pense un peu à nous, on prend une douche (plus ou moins sommaire selon le lieu et la température), on se repose un peu, on discute avec les gens. Eliot, lui, a plein d’énergie, joue, court et demande qu’on s’occupe de lui, mais il nous aide aussi à planter les piquets, à gonfler les coussins… Il joue avec tout ce qu’il trouve : sa pelle, son râteau et son camion, et aussi les longes, sangles, bassine pliable, les cailloux, branches, feuilles, pives… et places de jeu.

Vers 18h-19h, nous préparons le repas avec notre réchaud à bois.

Vers 20h, nous nous cachons sous la tente. Le rituel du dodo commence pour Eliot qui s’endort peu après. Sonia écrit le journal de bord et Olivier vérifie ou prépare le parcours du lendemain, puis après dodo.

Nous prenons plus ou moins 1-2 jours de repos par semaine, soit à suivre, soit isolés, selon le lieu trouvé et les choses à faire.

L’aventure se peau fine

Comme on l’avait prédit, il faut  bien 3 à 4 semaines pour que les choses se mettent en place. Les aventures continuent. Mais le moral est excellent, la relation entre nous va pour le mieux, Eliot joue avec tout ce qu’il trouve, les ânes prennent un peu trop leurs aises…

L’arrivée en France se fait par 7 km sur le bord de la départementale avant et après St Gingolph, ce qui n’est pas du tout agréable, même si nos braves ânes se tiennent docilement sur le bas côté de la route 90 km/h.

Les ânes

Toutefois, nos ânes ne sont pas toujours braves. A plusieurs reprises, ils ont fait de belles évadées. Une matin d’abord, à 7h, la voisine nous demande si nous sommes réveillés. Du coup, oui, et elle nous annonce que nos ânes sont sortis de leur enclos et pâturent dans le jardin. Le problème, c’est dès qu’Olivier les approche, ils partent au pas de course. Sonia et Eliot viennent à la rescousse et nous arrivons à les coincer sur le chemin, Olivier d’un côté, Sonia et Eliot de l’autre. Vers 8h, nous retournons à la tente, tout réchauffés malgré la fraîcheur matinale. En fait, nos ânes, surtout Basil, passent la tête sous la ficelle du bas (malgré 2 hauteurs de fil), et avancent petit à petit, jusqu’à ce qu’ils arrivent à sortir. Ils l’ont refait ailleurs.

Pour parer à ce problème, nous avons choisi pour la suite le piquet à visser en terre et la chaîne pour chacun. Comme cela, ils ne se chicanent plus pendant la nuit et ils ne peuvent plus se sauver.

Nos ânes se font aussi la belle en plein jour. Nous savons qu’il ne faut pas lâcher Apollon, car il broute tranquillement, sans regarder après nous, et s’enfuit dès qu’on l’approche. Par contre, si nous lâchons Basil, il faut bien tenir Apollon,  car à deux reprises, il s’est arrangé pour tirer sur sa longe et s’évader. Et les voilà qui courent sur le chemin, nous à leur trousse. Une fois les ânes attrapés, c’est le GPS qui tombe du sac au moment de l’échappée. Ouf, on le retrouve.  Il y a toujours plus de peur que de mal, mais c’est très embêtant et il faut faire preuve de ruse et de patience pour les coincer.

Pour la suite, nous remarquons que Sonia va mieux avec Apollon et Olivier avec Basil. Les ânes et âniers ont un peu leur préférence.

La blessure d’Apollon se guérit bien. Pour ces 2 semaines en France, nous avons opté pour deux sacs Ikea, attachés par une sangle, sur la couverture pliée en deux, à l’arrière de la plaie. Comme cela, Olivier garde le sac à dos pour la sieste d’Eliot et Sonia porte quelques affaires dans le petit sac. Pour la suite, nous allons pouvoir remettre le bat, car en le mettant un peu sur l’arrière, il ne touche pas la plaie et elle peut rester à l’air pour se soigner.

A Puplinge, nos ânes font la connaissance de Céline, l’ânesse à Edwin (désolée pour l’autre Céline) et des chèvres. Tout se passe au mieux.

Les sentiers et les rencontres

Après avoir longé la route pendant 7 km vers St Gingolph, nous avons eu notre dose et décidons de grimper sur les hauteurs, 600 mètres de dénivelés assez directs dans la forêt qui n’en finissent pas, surtout qu’Eliot a décidé de faire la sieste à ce moment-là, sur le dos d’Olivier. Mais c’est un très joli chemin, et surtout pas de voiture. En arrivant en haut, on se rend compte que Basil a perdu un parapluie. Olivier redescend un bout et Sonia, qui a froid, essaye d’allumer un feu pour faire un thé. Mais le bois est mouillé par la pluie et Eliot est tout grinche après sa sieste…  pur instant de solitude frileuse.

Nous arrivons à Tollon-les-Mémises, souvenir de la fameuse radio branchée de notre jeunesse. A la sortie d’un hameau, un couple s’arrête à notre hauteur et nous demande s’ils peuvent nous prendre en photo. La conversation s’engage. C’est le mardi, jour gris, humide et froid. Alors que nous parlons de notre campement, Sylvie et Gilles, nous proposent de venir loger chez eux, à 500 mètres. Elle nous fait rapidement visiter, en montrant où mettre les ânes, lui fait une flambée dans la cheminée et ils nous laissent la clé car ils ont un rendez-vous à Thonon. Et bien chapeau et merci. Nous sommes heureux, au chaud, au sec, alors que le lendemain, l’eau des ânes est gelée.

Le soleil réapparaît, avec une bise bien fraîche. La suite du chemin se fait sur les hauteurs, avec parfois une superbe vue sur le Lac Léman. Les chemins sont magnifiques, le plus souvent des sentiers caillouteux, dans la forêt. La température est idéale pour marcher, un coin à l’abris de la bise est souvent trouvé pour pique-niquer. Le soir nous avons toujours eu un lieu où planter notre tente.

Des rencontres aussi merveilleuses que généreuses nous donnent de la chaleur et du courage. Une famille qui vient nous apporter du sirop et des biscuits et nous propose sa salle de bain alors que nous campons dans le pré à côté. Un couple, à l’entrée d’un village, vers midi nous offre leur pain tout frais alors que nous leur demandons simplement s’il y a une boulangerie au village, et il rajoute des bouteilles d’eau, Evian évidemment. Ces enfants qui viennent discuter avec nous, alors que nous mangeons sur la place de jeu de leur école. Ces gens qui acceptent que nous campions sur leur terrain, avec nos ânes à côté. Le camping qui nous laisse le pré de leur cheval pour 3 nuits. La famille qui nous héberge chez eux pour une ou plusieurs nuits. A tous ces gens rencontrés : de tout cœur MERCI.

Nous avons aussi eu des visites à domicile. 3 nuits de repos dans un camping juste après Thonon nous font du bien et nous retrouvons le lac. Les nanas de Sonia sont venues vendredi pour un souper à Thonon-les-Bains. Grand moment de retrouvailles, même si ça fait 2 semaines que nous sommes partis. Le temps prend une autre dimension en voyage pour ceux qui partent, comme pour ceux qui restent. Carina et famille sont restés pour tester leur tente achetée la veille à Thonon. Martine et famille arrivent le lendemain dimanche pour nous laisser Jane qui marche avec nous quelques jours. Eliot a eu une belle compagnie pendant ces 6 jours. Les ânes aussi, car Jane est très douce et sait y faire avec les ânes.

Nous arrivons à Puplinge dans le canton de Genève mercredi 20 avril et y restons jusqu’à dimanche matin. Sonia se remet gentiment de son angine à streptocoques, sans doute reçue d’Eliot avant le départ. Le médecin le confirme vendredi matin et prescrit des antibiotiques. La fête de famille du Vendredi saint passe très vite, mais c’est très sympa.

Nous repartons dimanche vers Juvigny. Cette fois, nous sommes en France pour un bout de temps. Apollon a repris son bât et ça a l’air d’aller, il faudra suivre cela de très près.

Un anniversaire au Bouveret

Voilà, notre voyage a  commencé. Après tous les cartons du déménagement, nous sommes parti le 31 mars de notre maison, sous la pluie.

Le week-end est vécu dans la rencontre des amis et de la famille. Moment de partage, de rire avant la longue séparation. Dimanche, une bonne équipée nous accompagne pour prendre le chemin du départ de Vuippens, vers Riaz où nous pique-niquons et arrivée à Vuadens.

 

La pluie nous suit pour la première journée de marche, mais tout se passe bien. Près de la Goille à Jean, nous sommes accueillis dans une ferme et Eliot est tout content de dormir sur la paille.

 

Ensuite, le soleil nous sourit tous les jours. La descente vers Montreux-Villeneuve est épique. Basil a la diarrhée et imaginez les quais de Montreux, un vendredi de soleil et jour de marché. Sonia ramasse la m… avec la pelle pour la mettre dans des sacs pour chiens. On n’était pas très organisé pour cela, mais ça va. Nos ânes traversent sans problème le marché, sous les clics des appareils de photo. Ils font les stars et Eliot se demande bien pourquoi tout le monde le regarde.

Un passage épineux est et reste les ponts et rivières. Un pont à Villeneuve résiste à Basil et nous avons droit à toutes les suggestions des passants. Plus loin, le passage d’un canal avant le Rhône sépare la longe en 2 morceaux. Par contre, Apollon passe presque sans problème. Le Rhône, tant craint par sa largeur, se passe sans problème.

 

La marche se passe bien pour la famille. Eliot est souvent sur son âne Basil, mais il marche de temps à autre. Par contre, Apollon a une bonne plaie sur le dos qui lui a permis de marcher léger ces 3 derniers jours. Sabine et les parents ont pu nous transporter les bagages jusqu’à l’étape du soir. Toutefois, un grand tri s’impose dans nos bagages pour ne pas mettre de bât à Apollon, au moins pour les 10 prochains jours. Nous marcherons avec un sac à dos et referons le point à Genève. Malheureusement, Olivier reçoit un coup de boule d’Apollon en voulant le soigner. Dur dur…

Dimanche 10 avril, nous faisons un jour de repos pour l’anniversaire de Sonia et le passons au Swiss Vapeur Park. Joie pour les enfants, car quelques amis et famille nous rejoignent. Et le soir, enfin, une borne wifi nous permet de vous donner ces nouvelles. La plaie d’Apollon se cicatrise bien.

Pour la suite, nous allons marcher  vers St Gingolph, puis  vers Thonon et Puplinges dans le canton de Genève en espérant y arriver le Vendredi Saint pour une fête de famille.

La préparation des ânes et des âniers

Depuis que nous avons nos ânes, nous avons appris beaucoup de choses sur eux et sur nous.

Ils nous ont appris la patience, la douceur, mais aussi la fermeté, la persévérance.

Eliot en avait bien peur, mais jour après jour, il les a apprivoisés et leur fait un câlin chaque fois qu’il les voit.

Profil de nos ânes : Basil, 5 ans, avec nous depuis mi-juin 2010. Appolon, environ 14 ans, avec nous depuis début octobre 2010. Tous les deux des hongres, mâles castrés et haut d’à peu près 1.20 au garot.

Nos ânes nous ont déjà suivis sur plusieurs journées. Ils ont porté avec bravoure leur bât et sacoches et même un jeune garçon.

Ils ont dû affonter leurs peurs et les dépasser, comme le passage de rivières, de ponts, sauter de petits ruisseaux, descendre une pente sur des cailloux mouillés (là, c’est plutôt Sonia qui a dû calmer ses peurs!)… Basil s’y est vite mis. Quand nous avons eu Appolon, 4 mois plus tard, c’est Basil qui lui montrait comment faire.

Un dicton dit : « un âne n’est pas bête, mais il réfléchit longtemps ».

Notre matériel a aussi évolué avec les expériences. Face au soleil et à la pluie, nous avons testé le parapluie sur Basil durant l’été 2010, mais pas très concluant. Par contre, nous n’avons pas eu de pluie.

 Face à la pluie et au soleil, nous avons fait faire un système de capote sur le siège à Eliot, avec une protection sur le devant et sur les jambes. Pour le froid, il y a un mini sac de couchage, car quand Eliot ne marche pas, il a plus vite froid.

 

Nous voilà bientôt fin prêts pour le départ. Mais le serons-nous vraiment. Nous nous attendons à plusieurs ajustements, à toutes sortes de péripéties, à de merveilleuses rencontres, à des moments inoubliables, à des coups de gueule, …

 Vous en aurez un échantillonnage sur notre site…